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Quitter la propriété : réflexions sur un choix audacieux

Dernière mise à jour : 8 sept.

Des boites et des choix difficiles, il y en aura.
Des boites et des choix difficiles, il y en aura.

Cheminement, liberté et finances au cœur du débat locataire/propriétaire

Quitter la propriété, c’est bien plus que jongler avec des chiffres ou débattre d’une logique mathématique voulant que louer coûte moins cher qu’acheter. C’est une expérience viscérale, un bond dans l’inconnu, une remise en question profonde de tout un mode de vie. Pourtant, c’est exactement le choix que ma conjointe et moi avons fait, le 2 août 2025.

À l’heure où les outils fiscaux pour accéder à la propriété se multiplient et où l’idéal social semble nous pousser vers l’achat comme accomplissement suprême, nous avons consciemment choisi de faire un pas de côté, d’embrayer sur le reculons, à contre-courant du courant dominant.

Ironiquement, nos revenus nets n’ont jamais été aussi élevés—près de trois fois ce qu’ils étaient il y a trois ans. Nous avions largement les moyens de rester propriétaires. Mais la motivation n’était plus financière : elle est venue d’une charge mentale et physique devenue trop lourde (ou qu’on a cessé d’ignorer).

Depuis plus de six ans, nous occupions, entretenions, nettoyions et réparions une maison imparfaite (aucune ne l’est), certes, mais dotée de tout ce que l’on pourrait qualifier, enfants, de maison de rêve : espace, terrain, piscine, foyer, quartier paisible, voisinage charmant. Bref, tous les ingrédients y étaient. Reste que la réalité de la propriété ne nous convenait plus.

L’envers de la médaille

Depuis que nous avons partagé notre projet de déménagement avec nos proches, une constante s’impose : tout le monde reconnaît que posséder une maison exige du temps, de l’argent, et souvent les deux. Les réactions, quasi unanimes, nous ont amenés à réaliser qu’en verbalisant notre démarche, on venait toucher un point sensible chez plusieurs propriétaires : la liberté associée à la propriété se paie de précieuses heures, parfois de trop.

Nombreux sont ceux qui comprenaient notre démarche—certain·e·s allant jusqu’à l’envier, qualifiant notre démarche d’audacieuse, mais réfléchie. En expliquant notre processus d’arbitrage—vendre, placer l’argent, investir le différentiel chaque mois pour accélérer notre parcours vers l’indépendance financière, mais surtout, s’affranchir de la charge mentale—l’évidence s’est imposée.

Quand vient le temps de vanter la propriété, on oublie souvent tout ce qui pèse du mauvais côté de la balance. Et à l’inverse, les avantages de la location sont rarement mis en lumière. Il n’existe pas une seule voie valable : la croyance tenace en Amérique du Nord selon laquelle réussir rime avec devenir propriétaire mérite d’être déboulonnée.

Payer cher pour peu profiter

Depuis la fin des études de ma conjointe, nous avons multiplié les voyages, les découvertes culturelles et les engagements sociaux. Jean-Sébastien Pilotte disait dans « Liberté. Un dessein à l’indépendance financière. » : « Le voyage a complètement changé ma vie. » Difficile de mieux dire.

Nous passons la majorité de notre temps libre à l’extérieur. Il y en a pour qui la maison est le pivot du bonheur, qui adorent bricoler et entretenir leur espace. Et tant mieux si ce choix leur ressemble. Mais ce n’est pas notre cas. Reconnaître qu’on préfère investir son temps ailleurs, dans un univers où le « chez-soi » n’est pas synonyme d’ultime accomplissement, demande une certaine humilité.

Le faux comparatif

On entend souvent : « Pour le prix d’un bon loyer, tu pourrais avoir une hypothèque. » C’est un sophisme, car la réalité de la propriété va bien au-delà du simple paiement hypothécaire. À la facture s’ajoutent taxes scolaires et municipales, assurances majorées, entretien, réparations, rénovations—et surtout, du temps. Et on le sait : le temps, c’est de l’argent.

La preuve ? Pour reprendre ce temps, il faut déléguer, engager pour le ménage, l’entretien, les travaux. Chaque choix de consommation a un coût, souvent sous-estimé si on ne fait pas l’exercice rigoureux de tout calculer.

Nous avons donc listé toutes les dépenses liées à la maison : taxes, piscine, électricité, bois, assurances, sécurité, hypothèque. Résultat : plus de 3 000 $ par mois, avant même de considérer les imprévus. Notre hypothèque était agressive—objectif de remboursement sur 10–15 ans, loin du standard de 25 ans—car il nous semblait insensé de doubler le coût de la maison en intérêts juste pour libérer du cashflow à court terme.

En allongeant la période, on aurait pu réduire la facture mensuelle à 2 400 $, mais au prix de 100 000 $ d’intérêts supplémentaires sur 10 ans. Non, merci.

Cet exercice a été révélateur. Même avec un loyer bien situé offrant des aires communes, nous pourrions épargner au moins 1 200 $ de plus chaque mois pour notre projet d’indépendance financière. Les montants additionnés devenaient imposants.

C’est un départ

En quelques semaines, nous sommes passés de propriétaires sans plan à nouveaux locataires, bail signé, premier mois payé pour une transition en douceur. Nous avons déjà entamé le grand ménage et préparerons la vente vers la fin septembre. Comme quoi, la vie peut basculer rapidement lorsqu’on écoute ses motivations profondes—et il n’y a rien de mal à vouloir changer une situation qui ne nous ressemble plus.

Je tenterai de documenter la suite de ce parcours. D’abord pour moi—l’écriture m’aide à faire le point, à mettre de l’ordre dans mes idées. Mais si, au hasard de ces lignes, quelqu’un d’autre se reconnaît, qu’il ou elle sache que le doute est permis, que la propriété n’est pas le seul chemin vers la réussite.

À suivre...

*****

Illustration réalisée par GPT-5, via Copilot pour Microsoft Office, le lundi 8 septembre 2025, partant de la commande :

« Create a poetic paper collage diorama scene with shallow depth of field and warm, golden morning light. Depict a cozy interior where a couple sits on the floor, surrounded by boxes, thoughtfully sorting and decluttering their home. Through the window, show a quiet street with trees and gentle summer sunlight. In the background, incorporate whimsical representations of bills, mortgage contracts, and utility invoices. The overall atmosphere should convey optimism, questioning, and a sense of newfound freedom, emphasizing the contrast between the uncluttered living space and a luminous horizon that symbolizes new beginnings. Do not include any written words or text elements within the illustration.»

3 commentaires


R911
il y a 6 jours

Bravo pour cette réflexion qui va au fond des choses avec les bons calculs, au-delà des formules toutes faites et sans parti pris. J'ai trouvé ma voie dans l'acquisition d'une maison bigénérationnelle. Mais je suis conscient qu'il s'agit d'une voie parmi d'autres. Enfin quelqu'un qui ose déboulonner le mythe de la propriété comme accomplissement ultime. J'ai bien aimé vous lire !

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Antoine Denis
il y a un jour
En réponse à

Merci beaucoup pour votre commentaire! Effectivement, il n’y a pas de voie unique et il est sain de pouvoir en discuter ouvertement, car plusieurs se sentent malheureusement comme citoyen de seconde classe en tant que locataire, alors qu’au contraire je m’y sens maintenant en première ✈️

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R911
22 oct.

Bravo!

Modifié
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